Situé à l’est du pays, l’hôpital Ropero avait été un sujet tabou dans toute la ville. Reconnu pour son incapacité à soigner les clients, l’état avait exigé qu’il soit fermé. Dès lors, la maison avait été abandonnée, mais pas de tous, c’était là que le cousin de Brian avait trouvé refuge, c’était là qu’il opérait, loin des regards, loin des soupçons. Installé dans une petite pièce, équipée de trois écrans en particulier son ordinateur, il surveillait tout ce qui se passait sans pour autant mettre les pieds hors de la pièce.
Allongé dans son canapé, les deux pieds joints sur sa petite table, il sirotait calmement sa bière, accompagnée d’une série narcotrafiquant du célèbre Pablo qui se défilait sur l’un de ses écrans. Se redressant, il jeta un œil au petit écran qui se trouvait à sa gauche et c’était à ce moment précis qu’il vit l’arrivée d’une berline noire, il se redressa, agrandi les yeux. Cette voiture, il l’avait reconnue, c’était celle d’un proche de sa famille.
- Que vient-il faire ici ? se demanda t-il.
Il ouvrit son armoire, saisit son pistolet et sortit de la pièce.
Au-dehors, la voiture était immobile, Brian baissa sa vitre et jeta un coup d’œil à la cour.
- Vous êtes sûr qu’il est là ? demanda t-il à son homme de main qui était assis devant lui.
- Oui monsieur, il est là.
L’homme sortit, ouvrit la portière à Brian qui en sortant ajusta sa veste, conscient de l’événement et des disputes qui s’enchaîneront très bientôt. Accompagnés de son homme de main, les deux se rendirent à l’intérieur. Ils traversèrent le couloir, les chambres occupées uniquement par les anciens lits des patients jusqu’à pénétrer dans la concession où se trouvait son cousin. Malheureusement, il n’était pas là. Brian se tourna vers son homme qui se trouvait juste derrière lui.
- Nous avons eu la confirmation qu’il était là, monsieur, confirma à nouveau.
- Cousin, je sais que tu es là, fit Brian.
Il fit un clin d’œil à son homme qui se mit à fouiller la pièce, ayant tourné le dos à l’entrée, Brian ne savait pas que le danger était là, derrière lui. En voulant se tourner, il sentit la présence de quelqu’un avec un objet bien tendu sur sa nuque. Son homme sortit son pistolet et lui bondit en direction de son cousin.
- Dépose ton arme où je lui expose la cervelle, menaça le cousin.
- Tu n’as pas…
- Tais-toi, cousin, cria-t-il.
- Vas-y, ordonna Brian à son homme qui déposa son pistolet sur la table.
- Non, par terre et tu la pousses vers moi.
Il s’abaissa, poussa le pistolet vers le cousin de son patron qui l’attrapa.
- Très bien, maintenant, sors.
L’homme de main regarda Brian qui hocha la tête en guise d’exécution. À peine avait-il mis les pieds hors de la pièce que le cousin de Brian verrouilla la porte.
- Maintenant, que nous sommes seuls, nous allons discuter, va t’asseoir là-bas.
Brian obéit.
- Veux-tu me tuer ? demanda Brian.
Il ne répondit pas, il se contenta simplement de braquer son pistolet sur lui.
- Écoute, je sais que je t’ai offensé et si je suis là, c’est…
- Pour me demander un service, coupa ce dernier.
Il baissa son pistolet et sourit, tourna le dos à Brian qui ne fit pas le moindre geste.
- Je suis désolé, cousin, dit Brian.
- Désolé ? Désolé ? Désolé ? répéta celui-ci en se retournant vers lui. Veux-tu que je te rappelle tes mots ?
- Non, je sais que je t’ai fait du mal et si tu tiens toujours à…
- Non, je ne veux plus travailler pour votre organisation, refusa le cousin en s’approchant de la porte qu’il déverrouilla. Si tu es là pour me demander de l’aide sur cette organisation avec laquelle tu m’as fait chier, tu peux partir et faire comme si tu ne me connaissais pas.
- J’avais peur de t’entraîner dans cette vie, Édouardo
- Je pensais que tu avais aussi oublié mon nom ?
- Comment veux-tu que j’oublie ton nom ? Tu es mon cousin.
- Je t’ai supplié afin d’intégrer l’organisation, mais toi, tu m’as dit que ça n’arrivera jamais. Et pire, j’ai été ton malhonnête, non, votre malhonnête pendant des mois voir années. Sais-tu pourquoi ? Je nourrissais l’espoir d’être officiellement l’un de vos disciples un jour, mais toi, mon propre cousin, mon sang, tu m’as refusé l’accès.
- Si tu tiens toujours à…
- Non, Brian, refusa Édouardo.
- Veux-tu m’écouter ? Pour une toute dernière fois ? S’il te plaît, peux-tu t’asseoir ? S’il te plaît ?
Suite aux supplications de Brian, Édouardo referma la porte et partit s’asseoir sur le canapé d’en face.
- Tu te rappelles de quand on était encore enfant ? Le jour où tu as disparu ? Je t’avais cherché dans tout le quartier avec ton père, on pensait que tu as été volé alors que monsieur se trouvait sur un pont avec ses amis en train de faire des affaires louches jusqu’à ce que vous ayez détourné les contrôles énergétiques de toute la ville.
- C’était il y a dix ans et je n’étais qu’un adolescent.
- Tu te rappelles de la suite n’est-ce pas ?
Un large sourire se dessina sur les lèvres de Édouardo.
- Je me rappelle des tracasseries, de comment toute la ville était agitée et de ce que mes camarades et moi avions fait, mais vous m’avez protégé, mon père et toi.
- Et ça n’a jamais changé Édouardo, dit Brian, tu es mon cousin et si je t’avais refusé l’accès, c’est parce que j’ai promis à mon oncle, à ton père de toujours veiller sur toi, de ne jamais laisser quelqu’un te faire du mal. Et ça été le cas, je l’ai toujours fait, je t’ai toujours protégé. Tu sais, tu es un frère important pour moi, tu es le seul que j’ai comme membre de ma famille en dehors de ton père. Alors, je te demande de m’excuser et si tu ne veux pas savoir pourquoi je suis là, ni m’aider, ce n’est pas grave.
Il s’arrêta, se leva et prit la direction de la sortie. En voulant sortir, il s’arrêta, se retourna vers son cousin et articula :
- Savoir que tu vas bien est déjà bien pour moi, prends soin de toi, cousin. Je m’en vais.
Édouardo se leva et le stoppa.
- Dis-moi pourquoi tu es là ? J’imagine que c’est grave ?
Brian se retourna.
- Oui, très très grave.
- Je suis disposé à t’écouter, si tu le veux bien.
Brian se retourna et reprit sa place habituelle. Édouardo se dirigea vers sa petite armoire, l’ouvrit et sortit un pack de bière, il prit deux bières et en donna une à Brian.
- Merci beaucoup, cousin, fit ce dernier en l’ouvrant d’un coup et en prit un gorgé.
Édouardo fit de même et reprit sa place.
- Alors, que se passe-t-il ?
- Récemment, nous avons été menacés par un avocat, il aurait à sa disposition les aveux d’une pauvre fille qui aurait été la marionnette d’Élise. Hormis son témoignage, il a aussi les nôtres, pas un témoignage en tant que telles, mais des propos que nous avons avancés, le jour de sa visite. Il avait sur lui un…
- Un dispositif d’enregistrement, compléta Édouardo en buvant sa bière, on l’utilise très souvent pour faire des enregistrements automatiques et ses enregistrements sont directement transférés vers un autre dispositif, deux ou trois.
- Je pense que c’est ça.
- Vous voulez que je les trace ? Ou c’est quoi ?
- Tu peux le faire ?
- Oui, mais c’est lorsque je verrai le dispositif mère, c’est-à-dire celui qui commande les autres, même si c’est la série.
- C’était un stylo façon. Bref, ce n’est pas pour ça que je suis là. Nous avons fait le nécessaire pour l’envoyer en prison, mais il a été libéré provisoirement.
- Et vous voulez le faire retourner ou le tuer ?
- Les deux et c’est là que tu entres en jeu.
- Vous voulez que j’entre dans les bases de données de l’appartement où ils sont pour prendre le contrôle des caméras ?
- C’est exact, cousin. Écoute, tu n’es pas obligé de le faire, même si tu disais non, je comprendrais.
- Je vais le faire, accepta-t-il. Quand le ferions-nous ?
- Dans deux jours.
- As-tu des conditions ?
- Oui, j’ai des conditions.
- De l’argent ? L’intégration ?
- Oui !
- Tu les auras. Merci beaucoup cousin, je t’en voudrais ça.
- Trinquons !
Les deux trinquèrent avec leurs boissons qui donnèrent un bruit de réconciliation. Après avoir passé quelques minutes de plus avec son cousin, Brian rebroussa chemin. En cours de route, il appela Maurice.
- Ça a été comment ? demanda ce dernier.
- Ça n’a pas été facile, mais il a accepté de nous aider.
- Tu es sûr qu’il ne nous fait pas marcher ?
- Non, il nous aidera. Je suis en train de rentrer, une fois chez moi, on en parlera.
- Je voulais te parler de quelque chose.
- Vas-y, j’écoute.
Maurice lui expliqua un plan.
- Tu es sûr que ça marchera ? demanda Brian.
- Oui, ça marchera, je te l’enverrai et après avoir fini, tu l’envoies.
- Très bien, je me retournerai chez lui alors.
Il raccrocha.
- On se retourne chez mon cousin, ordonna-t-il au chauffeur.
- Un problème ? demanda son homme de main.
- Non, rien en particulier.
Arrivée au carrefour, le chauffeur se retourna et reprit la direction de l’hôpital abandonné.
***
Le lendemain…
Très tôt, le matin, Sergio s’apprêta, prit sa voiture et se rendit au commissariat.
- Monsieur Sergio, fit l’inspectrice en le voyant, je ne pensais pas vous revoir si tôt. Alors, que puis-je faire pour vous ?
- Je dois me rendre dans le bureau de mon ami, mais je dois avoir une autorisation pour pouvoir visionner les caméras de surveillance de ce soir-là.
- Vous voulez parler de ce qui s’est passé le soir du meurtre ?
- Oui, c’est ça. Vous l’avez déjà visionné ? N’est-ce pas ? Ou vous en avez une copie ?
- Voulez-vous vraiment visionner ?
- Oui, c’est la moindre des choses à faire.
- Hier, nous avons reçu les copies de cette soirée et croyez-moi, vous n’allez pas aimer la vidéo.
- Peu importe, si vous l’avez à votre disposition, alors, laissez-moi visionner.
L’inspectrice fit quelques tapes sur son ordinateur et tourna l’écran en direction de Sergio.
- C’est la vidéo du parking.
Sergio écarquilla les yeux et commença par visionner.
- Quoi ? s’étonna-t-il.
