Dans Munkamba, cette femme qui porte l’enfant, Pierre Ngindu Kabitanga raconte bien plus qu’une histoire. Il nous montre comment une femme, un enfant et un peuple tout entier deviennent les porteurs d’un message profond. Munkamba, en portant son enfant, porte aussi les promesses, les mémoires et les blessures de ceux qui l’entourent. Elle devient une figure silencieuse, mais essentielle, comme un signe qui annonce à la fois la souffrance et l’espérance.
L’auteur s’appuie sur une sagesse populaire Lulua pour expliquer ce qu’il veut dire. Il cite clairement :
Là où se forme une espèce de tourbillon accompagné des bruits de l’eau se cachent une grosse pierre… ou encore un tronc d’arbre perpendiculairement placé. MUNKAMBA, page 67, 1er paragraphe.
Pour lui, ce proverbe est une manière de dire que rien n’arrive sans cause. Quand on voit un tourbillon dans la société, un chaos, une crise, il faut comprendre qu’il y a aussi une vérité cachée qui demande à être dévoilée.
Il rappelle d’ailleurs que : « le tourbillon et les bruits de l’eau sont des signaux d’alerte qui appellent à la vigilance.» MUNKAMBA, page 67, 3e paragraphe.
C’est dans cet esprit qu’il parle de la période troublée du Kasaï et du déclin moral qui l’a accompagnée.
Sans détour, il écrit : « Enfonçons le clou sur l’immoralité dont l’origine est déjà révélée par l’Apôtre Paul aux Galates… » Et il décrit l’un des gestes les plus choquants que la justice populaire ait imposés à une femme accusée : « Coucher avec son propre fils publiquement sous les acclamations et hurlements sur le sol Luba Kasayi (justice populaire sous le phénomène KAMUINA NSAPU) est l’un des souvenirs recommandé pour illustrer le plus haut degré d’immortalité dont les conséquences sont inévitables…» MUNKAMBA, page 73, 1er paragraphe.
Cette phrase, qu’il ose citer directement, n’est pas là pour créer un scandale. Elle sert à montrer jusqu’où peut tomber une société quand elle perd ses repères et quand la violence dicte sa loi.
Kabitanga évoque aussi un autre cas, celui d’un homme décapité non pour un crime réel, mais simplement parce que son téléphone contenait la photo de son jeune frère policier.
Il note : « La peine était celle de mort par décapitation… c’est le cas du défunt Mukengeshayi Mulamba… »
Ces exemples, mis en style direct, montrent la gravité de la situation. Ils rappellent que, comme il le dit lui-même, ce sont des actes de méchanceté qui proviennent d’hommes « livrés à eux-mêmes », comme dans les temps décrits par Saül de Tarse.
Face à ce paysage sombre, Munkamba apparaît comme une lumière fragile mais réelle. Elle rappelle que la femme est souvent la première gardienne de la vie, du sens et de l’avenir.
L’auteur écrit que lire son récit, c’est « accepter d’ouvrir les yeux sur la dignité de la femme, la fragilité des peuples et l’appel à revenir à un ordre plus juste, plus humain, plus vrai. »
Ainsi, au milieu des violences, des humiliations et de la perte de valeurs, Kabitanga nous invite à regarder autrement. Il nous pousse à comprendre que chaque crise a sa cause, que chaque souffrance est un signal, et que chaque peuple doit retrouver la vérité et la justice pour survivre. Son récit n’est pas seulement littéraire : il forme, il avertit et il éclaire.
Munkamba devient alors une voix, une conscience. Son histoire nous dit qu’un peuple peut tomber très bas, mais qu’il peut aussi se relever s’il écoute enfin ce que les tourbillons tentent de lui dire.
Cette œuvre, nourrie de profondes intuitions spirituelles et d’un questionnement sincère sur Dieu, l’ordre naturel et la volonté du Créateur, se présente comme la restitution d’une expérience intérieure rare, écrite en âme et conscience. Lire Munkamba, c’est accepter d’ouvrir les yeux sur la dignité de la femme, la fragilité des peuples et l’appel à revenir à un ordre plus juste, plus humain, plus vrai.
