La valeur d’un soldat se mesure au nombre de cicatrices sur son corps. Cela se vérifie si bien lorsqu’on passe à la loupe le parcours exceptionnel de personnalités ayant défié le déterminisme naturel et biologique pour caresser les doigts frais de la réussite.
Le livre Les enfants du miracle du professeur Odon Vallet nous en offre la preuve à travers un corpus d’histoires fascinantes de ceux-là qu’il nomme « les enfants du miracle » ; ceux-là qui, de part leur ardeur, leur dévouement, ont gravit, progressivement, mais excellemment, l’échelle du succès, allant des milieux les plus défavorisés jusqu’aux bancs des grandes écoles.
Paru aux éditions Albin Michel à Paris en 2011, Les enfants du miracle est ce que l’on pourrait appeler un recueil de vies exceptionnelles. Écrit rigoureusement sur 153 pages, ce livre, chapeauté d’un avant-propos de l’auteur est subdivisé en trente (30) chapitres consacrés à trente différentes personnalités. Si ces dernières partagent quelques traits en commun, c’est bien leur détermination, leur goût pour le travail bien fait, leur foi non seulement en la volonté divine, mais aussi et surtout en une cause et par-dessus tout, leur origine ordinaire.
Parmi ces personnalités, figure M. Espéran PADONOU, docteur ès mathématiques. Avant de pointer le curseur sur celui-là qui est l’actuel président de l’ONG Bénin Excellence et le directeur de la Fondation Vallet, il importe de tenter une clarification à ce que le professeur Odon Vallet entend par enfant du miracle.
Les enfants du miracle, affirme-t-il, ne sont pas des prodigues. Il ne faut surtout pas les prendre pour des anges. Parce qu’ils sont loin d’être les enfants les plus aimés de Dieu. Leur origine ordinaire en est la preuve tangible. Mieux, la situation financière de la famille dans laquelle ils ont été jetés, pour emprunter le mot à Jean Paul Sartre, contraste avec un tel postulat.
Les récits de leur vie montrent plutôt du travail, de l’intelligence, un peu de chance et beaucoup de réussite, mais aussi un parcours parsemé d’embûches, de difficultés et de défis, comme c’est le cas avec M. Espéran PADONOU.
Les pages à lui consacrées dans ce livre révèlent beaucoup de choses sur l’homme. Voici quelques-unes de ces choses que vous ne saviez peut-être pas sur celui qui se définit aujourd’hui, tout souriant, comme « le panafricaniste positif ».
Espéran Padonou : le survivant miraculeux
Si tous les enfants, avant de venir au monde, ont dû inévitablement remporter la médaille du spermatozoïde le plus endurant, la période de l’après-victoire peut se révéler pénible pour certains, et douce pour d’autres. M. Espéran Padonou coche, malheureusement (ou heureusement), la première case. Conçu dans un couple d’infirmiers, sa vie commença, sa mère n’étant enceinte alors que de quatre mois, par la perte d’un être très cher : son frère jumeau. En effet, à quatre mois de grossesse de ses jumeaux, elle fit une fausse couche. Miraculeusement, il n’y avait qu’un des fœtus qui fut évacué. Très tôt donc, celui qui sera plus tard Espéran Padonou, dû subir cette solitude. Cela explique-t-il la fraternité dont fait montre l’homme dans la vie de tous les jours ? Une chose est sûre, il vint au monde sans problème, avec dans le corps, la force de deux personnes comme il le martèle très souvent à qui veut l’entendre.
Naître des entrailles d’une mère lettrée : une bénédiction
Pour un enfant africain, naître dans une famille pauvre est un double châtiment. L’ancien président ivoirien, Laurent Gbagbo exprimait si bien ce paradoxe : « lorsque vous êtes né en Afrique, la vie vous mène automatiquement 1-0. Si vous n’êtes pas éduqué, 2-0. Si vos parents n’ont pas d’argent, c’est 4-0. À ce stade, vous n’avez d’autres choix que de vous battre tous les jours pour égaliser. » Il ne serait pas du tout exagéré d’affirmer que la vie menait Espéran Padonou 4-0. Parce que le couple d’infirmiers dans lequel il vit le jour n’était point aisé financièrement. Malgré l’amour fou pour les études que l’enfant miracle afficha très tôt, le salaire conjugué de ses parents était trop maigre pour qu’ils inscrivirent leur enfant dans une école privée. Il serait donc un péché de ne pas reconnaître le rôle déterminant qu’a joué sa mère dans son éducation. En effet, peu importe le poids du déterminisme, lorsque l’un au moins des parents sait lire et écrire, cela peut se révéler déterminant dans l’éducation des enfants. C’est le cas chez Espéran Padonou. Au cours préparatoire, par exemple, il s’est retrouvé dans une classe qui comptait cent quatre-vingt-deux élèves, un effectif trop pléthorique pour faciliter la vie à l’enseignant et conduire à une éducation de qualité. Sa mère, consciente de cette réalité mais incapable de l’inscrire dans une école privée, due le transférer dans une autre classe à effectif réduit de cent cinquante-deux têtes. Soucieuse de l’avenir de son enfant, elle s’occupa elle-même de lui apprendre à lire, à écrire et à calculer. Cette condition de vie a, sans nul doute, été l’élément déclencheur de cette envie fou que manifestait l’enfant pour rendre ses parents fiers et les sortir de cette condition de vie difficile. C’est aujourd’hui un pari réussi pour l’homme. Cela explique-t-il aussi le fait que l’homme s’investit aujourd’hui corps et âme dans l’éducation et dans la culture ? C’est une possibilité.
L’incident scolaire qui lui vola une année scolaire
Une autre chose, et pas la moindre, que vous ne savez peut-être pas sur le président Espéran Padonou, c’est cette perte de temps dont il a été victime dans son parcours scolaire. Dans la situation de classe, lors d’une bousculade, Espéran reçoit une fracture de jambe. Si dans le contexte français d’alors, ce mal aurait pu être réparé au plus en trois semaines, comme le souligne le professeur Odon Vallet, il a dû coûter toute une année scolaire à Espéran Padonou. Ici aussi, le rôle de sa mère a été déterminant parce qu’elle fit le nécessaire pour qu’il ne désapprend point. Cette année perdue a peut-être laissé une empreinte dans la conscience du président de l’ONG Bénin Excellence que l’homme est devenu. Cela s’explique par le sens rigoureux dont il fait montre dans la gestion du temps. Quiconque a croisé le chemin de l’homme sait qu’il taille une importance capitale au temps qu’il gère comme un militaire.
Le succès fulgurant qui exporta la réputation du jeune étudiant hors des frontières du Bénin
Le rencontre de M. Espéran Padonou avec le professeur Odon Vallet ne fit point un hasard. C’est au contraire un fait qui estampille l’idée selon laquelle il n’y a que le travail bien qui sait rapporter de bénéfices. Par son parcours scolaire teinté d’excellences, il attira très tôt les projecteurs et devint un modèle dans toutes les écoles qu’il fréquenta. Meilleur élève de son école et de son pays, major du Bénin au BEPC et au BAC scientifique, il devint la vedette de son établissement. C’est ainsi qu’il fut dispensé de sa scolarité. Il recevait régulièrement de la part du gouvernement des aides en nature, telle qu’une moto ou un ordinateur. C’est ainsi que sa réputation parvint aux oreilles du professeur Odon Vallet qui lui accorde une bourse d’excellence.
Le professeur Odon Vallet, faut-il le rappeler, est un spécialiste des religions ayant enseigné à Sorbonne, à Science-Po et à l’ENA. Il est un véritable défenseur de service public et aimerait abattre les barrières de l’argent.
Edmond BATOSSI
Étudiant en Master 1 Droit privé fondamental à l’université d’Abomey-Calavi