Quand l’amour vrai rencontre l’ingratitude… récit de Dieudonné Abilé
Quand l’amour vrai rencontre l’ingratitude… récit de Dieudonné Abilé

Quand l’amour vrai rencontre l’ingratitude… récit de Dieudonné Abilé

Dans ce récit poignant, Dieudonné Kayossi Kodukpè Abilé explore les ravages du regret et de la négligence amoureuse. Entre tendresse trahie et promesses non tenues, un homme raconte comment, en poursuivant la réussite, il a perdu la seule personne qui l’aimait véritablement : Élise. Une histoire à lire absolument.

Quand j’avais tout, je l’ai perdue.

Assis dans le coin du restaurant, je dévisageai ceux qui m’entouraient. Devant moi se trouvait un couple. Un couple qui se chamaillait et se taquinait. Cette harmonie, je l’avais vécue. Oui, j’avais vécu cela avec Élise.

Élise était une femme en or. Elle était tout pour moi. Elle faisait le nécessaire pour le pauvre être que j’étais à l’époque. Mais moi, j’étais devenu un idiot et je la voyais comme une malhonnête, comme une femme qui ne s’y connaissait en rien. Je me souviens de ce jour, le jour où elle avait franchi ma petite cabane qui me servait de chambre. Elle était toute excitée :

Je suis enceinte, nous allons être parents, m’a-t-elle annoncé.

Nous allons être parents ? Je vis ma vie défiler devant moi. J’étais un étudiant qui essayait de s’en sortir. Manger était difficile, et si Élise, ma copine, n’était pas tombée sur mon chemin, je serais déjà dans le plus bas des trous. Elle était toute heureuse, mais moi, qu’ai-je fait ? J’ai convaincu Élise d’avorter cet enfant, de l’enlever de son ventre sous prétexte que je devais terminer le campus et qu’ensuite, je la prendrais comme épouse. Elle m’a cru.

Le lendemain, elle m’envoya une photo d’elle allongée sur un lit d’hôpital. Elle avait avorté la grossesse. Pauvre Élise !

À la fin de mes études, j’ai eu la chance d’intégrer un cabinet juridique comme stagiaire. Ensuite, j’ai été promu à un poste et signé un contrat à durée indéterminée. Élise était heureuse. Elle avait réussi à faire de moi ce que je suis devenu.

Ma vie avait changé. J’ai déménagé dans une maison à quatre pièces. Je n’étais plus ce jeune homme qui vivait seulement entre quatre murs. Après cette réussite, j’avais commencé à voir Élise comme un « manque de rien », comme une fille qui n’était rien, une fille qui ne m’apporterait que des problèmes. Pourtant, hier encore, elle était tout pour moi.

Nos conversations avaient d’abord pris un coup. Moi qui, autrefois, étais attentionné, je suis devenu distant, sans importance. Je ne faisais plus attention à elle. Parfois, j’ignorais même ses messages. Quand mon portable sonnait et que son nom s’affichait à l’écran, je devenais un chien enragé, méconnaissable.

Elle avait tout fait pour régler le problème, m’exhortait chaque jour, me forçait à la conversation, mais moi, j’étais aveuglé par la réussite.

Un soir, alors que j’étais dans ma chambre avec une fille que j’avais rencontré récemment, la porte s’ouvrit sur Élise. Elle nous a surpris en plein ébat sexuel.

Elle resta figée à nous observer. Moi, je n’avais pas les mots nécessaires pour lui parler. La fille qui se trouvait à mes côtés cacha ses yeux avec ses deux mains, tandis que moi, j’essayais d’éviter le regard d’Élise. Ses larmes coulaient. Elle n’arrivait pas à croire que j’étais en train de faire une telle chose. Moi, qui lui avais promis fidélité et mariage à la fin de mes études, me voilà en train de faire tout le contraire.

Elle s’agrippa à la porte et, tout doucement, s’écroula au sol. Je bondis du lit et m’approchai d’elle. Elle était inconsciente, mais elle continuait de respirer. La fille qui me servait de plaisir sexuel se leva, prit ses affaires et disparut.

Assis sur le lit, les deux mains sur la tête, je me posais des questions auxquelles je n’arrivais pas à trouver de réponse exacte. Pourquoi suis-je là ? Inconscient ? À attendre qu’Élise se relève alors que je pourrais l’amener à l’hôpital ? Qu’est-ce que je suis en train de devenir ?

Soudain, je vis du sang glisser des jambes d’Élise. C’était à ce moment-là que je me suis réveillé de mon sommeil de malhonnête. Je me levai rapidement, enfilai un t-shirt et un jean. Je pris Élise dans mes bras et sortis de ma chambre en courant. Dieu merci, je tombai sur un zem qui accepta de me déposer à l’hôpital le plus proche. J’avais peur. Mon cœur n’arrêtait pas de battre.

Arrivés à l’hôpital, Élise fut rapidement prise en charge. J’étais là, debout dans la salle d’attente, à attendre la nouvelle du médecin. À attendre que quelqu’un entre et m’annonce que Élise allait bien. Les secondes passaient. Les minutes défilaient, laissant place maintenant aux heures. Cela faisait exactement deux heures que j’étais là, dans ce couloir, à attendre.

Soudain, la porte s’ouvrit sur le médecin. Je courus rapidement vers lui.

Alors, comment va-t-elle ?

Il me regarda comme s’il avait peur de m’annoncer ce qui se tramait. Mon cœur s’accéléra davantage dans ma poitrine.

Je suis désolé de vous l’annoncer, monsieur. Votre femme a perdu la grossesse.

Grossesse ? ai-je répété, choqué. Comment ça, grossesse ? Élise était encore enceinte ?

C’est dû au stress, ou elle a subi un choc grave qui a eu un effet direct sur le fœtus. Je suis désolé, monsieur.

Sur ces mots, il m’abandonna et partit. Je restai là, debout comme un malade. Qu’ai-je fait ? Élise était encore enceinte de moi, et je lui ai fait perdre l’enfant ? Mon Dieu !

Au lever du soleil, je me suis rendu dans la chambre d’Élise. Elle était là, allongée sur le lit, les yeux remplis de larmes.

Tu as tué mon enfant. Je pensais que nous formerions une très belle famille. Tu étais tout pour moi. Je refusais les avances de ces hommes riches, la pression de mes parents, juste pour être à tes côtés. J’ai fait mes petites activités pour financer tes études. Quand je t’ai annoncé ma première grossesse, tu m’as convaincue et je suis allée avorter. Tu m’as promis que, quand tu serais bien, nous allions vivre une très belle vie. Mais depuis que tu es devenu ce que tu étais censé devenir, je ne suis plus à la hauteur de tes attentes. Je suis devenue ton ombre. Tu ne répondais plus à mes messages, ni à mes appels. Et quand tu répondais, c’était avec agressivité. Je me suis convaincue que c’était dû au boulot et que tout irait bien. Mais ça devenait encore plus difficile jour après jour. Il y a deux semaines, j’ai découvert que j’étais enceinte. J’étais tellement contente à l’idée de porter encore ton sang, de savoir qu’une partie de toi grandissait dans mon ventre. Je tenais à t’en faire une surprise, croyant que cela allait te faire changer d’idée, de philosophie. Mais non, je me suis trompée. En venant chez toi hier, je voulais te l’annoncer pour de bon et qu’est-ce que j’ai vu ? Le bon monsieur en plein ébat sexuel.

J’étais sans mot. Les larmes coulaient de mes yeux. Je ne savais pas quoi dire. Pauvre Élise. Elle tourna son visage vers moi.

Quand tu n’avais rien, on vivait heureux. Tu as été le plus beau cadeau que j’ai toujours attendu. Mais je me suis trompée. Je te remercie pour ces bons moments passés ensemble. J’espère que tu trouveras une très bonne fille, bien meilleure que moi. Je ne t’en voudrai pas. Jamais. Tu ne m’aimes plus, et ça se voit clairement. Je ne te forcerai jamais à me choisir. Maintenant, laisse-moi seule, et rends-moi un service : ne paie pas mes soins. Je les paierai. Et aussi, ne t’avise pas à dire quelque chose. Tu en as déjà assez dit. Adieu.

Élise, écoute, je…

Elle détourna son visage du mien.

Je suis désolée, dis-je.

Je la regardai une dernière fois et sortis de la chambre. J’ai brisé un cœur pur. Un cœur qui était prêt à tout pour moi.

Les jours suivants, je me suis noyé dans l’alcool. J’étais devenu mon ombre. Je ne passais pas une journée sans en prendre. Ma routine avait continué jusqu’à ce qu’un soir, je vis une connaissance d’Élise poster sa photo annonçant son mariage. Face à cette annonce, j’étais perdu. J’avais tout détruit. Quelques jours plus tard, Élise se maria. Si seulement j’avais su me retenir. Si seulement j’avais su garder cet œuf.

Lentement, je saisis la bière qui se trouvait devant moi et la vida. Je commandai encore, encore, et encore, jusqu’à ce que j’atteigne mon niveau habituel. J’aurais tellement aimé qu’Élise soit à mes côtés et que nous soyons à nouveau heureux, comme ce couple.

Pourquoi faire une promesse si nous ne pouvons pas la tenir ? Pourquoi obliger l’autre à tout abandonner pour nous et le laisser en cours de route ?

Je levai les yeux à nouveau vers ce couple. Ils sourient. Moi, je me noie dans ma bière et dans mes regrets. Élise aurait dû être là, en face de moi. À dieu Élise ! Sois heureuse !

✍️ Dieudonné Kayossi Kodukpè Abilé


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