La problématique de la place de la femme dans la société est souvent sujet à beaucoup de controverses. La société a été taillé de telle manière pour que la femme perde de sa superbe et descende de son piédestal. Quel rapport la société entretien t-elle avec la femme ? Comment la femme est-elle représentée ? Comment expliquer le fait que parmi les 365 jours de l’année, seulement une seule journée a été choisie pour honorer la femme ? Quel est le fruit du 8 mars, journée consacrée à la femme ? Sur 104 pages, Sobdibé Kemaye à travers sa deuxième œuvre qui est un essai invite à la quête de sens dans les pratiques sociétales. Le 8 Mars : Fête de pagne ou de défilé ? a été publié aux Éditions Toumaï en Mars 2021 à N’Djaména.
Résumé de l’ouvrage Le 8 mars : fête de pagne ou de défilé ?
L’œuvre Le 8 Mars : Fête de pagne ou de défilé ? de l’écrivaine tchadienne Sobdibé Kemaye est une interrogation sur la fête du 8 mars : fête dédiée aux femmes. L’auteure invite à repenser la fête du 8 mars, mieux à revoir la place de la femme dans nos sociétés. Sobdibé Kemaye ne dédie pas son livre à un sexe particulier mais plutôt aux deux sexes.
C’est-à-dire à l’homme et à la femme de sorte que chacun puisse oeuvrer pour le développement de la société. Soulevant dans son œuvre les différentes situations auxquelles la femme est confronté, Sobdibé Kemaye offre à travers cette œuvre une didactique de vie.
Analyse et avis sur l’ouvrage le 8 mars : fête de pagne ou de défilé de Sobdibé Kemaye
De par le titre de l’ouvrage, Sobdibé Kemaye montre qu’il y a une urgence. Une urgence qui interpelle tous. Pour illustrer, lorsque la chambre du voisin est en feu ce n’est plus son affaire à lui tout seul mais plutôt l’affaire de tout le village. C’est à cette vision holistique qu’invite l’auteure à travers son ouvrage.
La fête du 8 mars ou plutôt la journée du 8 mars est une fête dédiée à la femme. Cette journée a été choisie par la société afin de reconnaître la valeur de la femme, la place de la femme et autres. Mais Sobdibé Kemaye pose une question : cette fête est-elle une fête de défilé ?
Autrement dit, la fête du 8 mars célébrée chaque année porte-t-elle des fruits ? Quelles sont les retombées de cette fête ? Cette fête a-t-elle contribuer à promouvoir le statut de la femme ? Malheureusement non ! Le constat de Sobdibé Kemaye est alarmant. Pour voir plus loin, l’auteure évalue le poids de cette fête ou journée consacrée à la femme.
Partant de l’Afrique ancestrale, de la place et du rôle assigné à la femme depuis des millénaires et pourquoi pas des siècles, Sobdibé Kemaye constate que la femme << considérée comme l’ombre fraîche sous laquelle se reposaient tous les membres de la famille.>> ( p 12 ) n’est plus ce qu’elle était.
Les différents slogans ou refrains qui prônent le progrès, le développement de notre ère, se désole l’auteure, n’ont contribué qu’à faire oublier à la femme son objectif et son rôle primordial. Elle demande à la page 12 de son ouvrage :
<< Mais, est-ce que cette émancipation nous maintient toujours, comme l’ombre fraîche de la famille ou bien elle ternit plutôt ce rôle important que Dieu nous a donné dans la vie ? >>
Il est important rappelle l’auteure que la femme prenne conscience et reprenne ses responsabilités car dit-elle : << …sache que personne ne peut te remplacer dans ta maison, car ton rôle y est nécessaire. >>.
Mais quelle est la réelle signification de la fête du 8 mars ? L’auteure ne caresse pas les femmes dans le sens de poil, mais plutôt les déchante. On pourrait même penser que cette fête est un mythe car elle ne contribue en rien à faire éclore ce qu’elle célèbre.
La fête du 8 mars selon Sobdibé Kemaye est une raillerie, une moquerie contre les femmes. Elle affirme à la page 14 de l’ouvrage : << Les hommes se moquent de nous, mes sœurs ; pourquoi une seule journée dans l’année pour nous, les femmes ? >>
Les femmes doivent prendre conscience de la place qu’elles occupent dans la société. Elles doivent comprendre que les différentes célébrations, notamment celle du 8 Mars ne contribuent qu’à les embourber, les enfoncer plus bas. Sobdibé Kemaye ne rate pas les femmes, elle les interpelle sur la sacralité de leur présence et les appelle à prendre leurs responsabilités.
Car dit-elle : << Si notre monde va à la dérive, c’est en partie, par la faute des femmes.>> p.15. À travers son ouvrage, l’auteure montre que les femmes sont responsables de leurs enfants. Le rôle de la mère est plus grand que tout autre. Il faut souligner que Sobdibé Kemaye apprend ou du moins confirme que l’échec des enfants est partie intégrante de la responsabilité de la femme car le trou laissé par une « maman irresponsable » ne peut-être comblé.
La femme souligne Sobdibé Kemaye, est une créature de cœur. Elle est celle qui a toujours le cœur sur la main. La femme est douce, tendre, elle est une source inépuisable, une mer dont les vagues insatiables ne tarissent jamais. La femme doit toujours combler le vide dans la vie de son enfant, puisqu’elle tient plus son enfant à cœur que l’homme.
Sobdibé Kemaye prouve cela quand elle affirme à la page 18 : << Quand un père abandonne son enfant, la mère doit plutôt s’y accrocher et ne doit en aucun cas l’abandonner, parce qu’elle est différente de l’homme : pendant que l’homme agit avec le cerveau, la femme agit avec le cœur.>>.
L’auteure nous rappelle qu’il est important que les femmes ne perdent pas de vue le rôle important qu’elles jouent dans l’éducation de toute une nation. Car dit-elle : << … c’est d’abord elles, la base de l’éducation des enfants. >> ( p17)
Il faut souligner que cet ouvrage de Sobdibé Kemaye est une école à laquelle elle invite toutes les femmes. Être femme selon l’auteure est un grand privilège du créateur. Un privilège que l’on se doit de préserver. La femme est le plus grand mystère de Dieu.
Il est donc primordial que les femmes sachent ce qu’elles sont et qu’elles ne se contentent plus des miettes ou des restes que leur offre la société. Pour illustrer cette grandeur de la femme, cette force éternelle qu’elle représente l’auteure nous apprend que :
<< Allaiter ou téter est un geste qui te lie, toi maman, à ton bébé. C’est le seul privilège intime et c’est ce que Dieu a donné à toi seule, maman.>>
Toujours pour montrer la valeur, le privilège que l’on a d’être femme, l’auteure continue : << Jamais à papa, malgré sa supériorité, il ne peut jamais changer ton privilège.>> Que faut-il comprendre donc de ces paroles pleines de sagesse de Sobdibé Kemaye ?
Sobdibé Kemaye cherche à faire comprendre aux femmes qu’elles ne sont en rien les sujets des hommes. Les femmes, malgré les différentes conceptions sociales, sont bien plus que la société ne l’imagine, apprend l’auteure. La femme, la mère, est la première personne, le premier être que reconnais un enfant.
L’auteure montre que le nom de la femme : MAMAN, est le premier nom que prononce un enfant quand il commence à parler. Et d’ailleurs dit-elle : << Ce n’est pas par hasard qu’on met dans nos curriculum vitæ : langue maternelle.>> p20.
Sobdibé Kemaye à travers les différents attributs de la femme, montre aux femmes le rôle qui est la leur. Mieux, elle montre l’importance et la valeur que les femmes doivent s’accorder à elles-mêmes et cette valeur, cette importance passe par l’accomplissement de leur premier rôle : celui de mère.
Dans son œuvre l’auteure, avec sa plume toujours sage et maternelle, explore presque tous les aspects de la vie humaine. C’est-à-dire tout les différents domaines où interviennent la femme. Car la femme c’est la vie ! Mais il faut préciser que l’auteure insiste de façon particulière sur l’éducation des enfants et éduquer un enfant c’est éduquer toute une nation.
Les femmes, nous rappelle Sobdibé Kemaye, ne doivent en aucun cas prendre ce rôle à la légère. La fête du 8 Mars, explique l’auteur, est un vin capiteux qui monte à la tête de plusieurs femmes et leur fait oublier leur rôle d’éducateur.
Au lieu de chercher à s’acheter les pagnes du 8 Mars, faire des regroupements de femmes dont les bières, la nourriture, la musique et leur corollaires en seront le fondement, Sobdibé Kemaye rappelle que les femmes devraient plutôt secourir leurs époux dans l’éducation et le maintien du foyer.
Il n’est pas question d’accuser la gente masculine. L’auteure crie en avoir marre du fait que ce soit toujours les femmes qui soient victime de violences, d’abus et autres. Elle appelle les femmes à faire un examen de conscience qui leur permettra de se situer dans la société par rapport à l’homme.
Si la femme est toujours banalisée, reléguée au second rang nous dit Sobdibé Kemaye, c’est de la faute des femmes elles-mêmes et de personne d’autre.
L’ouvrage, Le 8 Mars : Fête de pagne ou de défilé ? de Sobdibé Kemaye est une œuvre monumentale et didactique. L’ouvrage est accessible à tous, et surtout sera plus bénéfique à tous ceux qui tiennent à cœur le développement de nos sociétés : un développement plus égalitaire. Il est constitué de 26 chapitres auxquels précède les remerciements et la préface et enfin succède la postface.
L’auteure à travers un style d’écriture fin et exquis nous interpelle, à évaluer et considérer l’unité des problèmes sociétaux. Sa position de défenseur des droits de femmes ne l’empêche guère de dénoncer les maux dont les femmes sont elles-mêmes responsables. Il faut dire que cette œuvre est d’actualité dans la mesure où les réflexions liées à la femme font la une.
Si le féminisme à ses débuts se veut égalitaire et libérale, et la seconde radicale, Sobdibé Kemaye se situe mieux dans la troisième vague qui est celle du postféminisme. L’auteure à travers ses œuvres dont la première : Le sexe féminin, une fatalité ? et la seconde qui a fait objet de cette chronique ne cesse de défendre l’égalité des rapports de sexe et l’importance de chaque sexe dans l’action pour le développement.
Bref aperçu sur l’auteur
Sobdibé Kemaye alias Maman Sob, est une écrivaine tchadienne née le 29 juillet 1970 à N’Djaména au Tchad. Auteure du roman, Le sexe féminin une fatalité ?, et d’un essai, Le 8 mars : fête de pagne ou défilé ?. Enseignante sortie de l’Université du Tchad en 1996 avec une licence en Linguistique, Maman Sob est aujourd’hui détentrice d’un Master 2 en littérature orale obtenu à l’Université de N’Gaoundéré en 2021. Elle est passionnée par l’art et la culture.
Elle reçoit le meilleur prix de l’écrivaine culturelle à la première édition du FILAB 2023 ( Festival International du Livre et des Arts assimilés du Bénin). Elle fait partie des militantes pour la défense des droits de la femme. En un mot, elle est une féministe. L’auteure est également membre de l’association des écrivains et auteurs tchadiens ( ASEAT ).
Bibliographie
– Le sexe féminin, une fatalité ? Roman
– Le 8 Mars : Fête de pagne ou de défilé ? Essai
Régis Mahougnon HANTAN est poète slameur, écrivain, flûtiste et chroniqueur littéraire à L’ivre du livre. Il est également philosophe de formation à l’université d’Abomey Calavi. ( UAC ).