Stelane Daniel MBALA ELA est un écrivain et théoricien originaire du Sud Cameroun. Il est un homme des sciences humaines et sociales. Créatif, il s’intéresse à tour de rôle à la musique, le slam, la lecture et l’écriture. Il est le père fondateur du courant littéraire Androiditiste et auteurs de nombreux écrits dont La Hargne des paradoxalités, Primauté, Hier, Aujourd’hui, l’Afrique et le Dehors, Communauté spéciale, Saturation de la brûlure (publié récemment) etc. Dans cette interview, il nous parle de ses ambitions, de son courant littéraire et de ses passions.
Partie 1 : Dynamique Littéraire
1. Quelles ont été les principales sources d’inspiration littéraire qui ont façonné votre parcours en tant qu’écrivain et théoricien ?
SDME : Lorsque je commence à écrire en classe de seconde, je suis en, à cette époque, touché par la lecture de Paroles de Prévert, de Ainsi parlait Zarathoustra de Nietzsche et Balafon de Mveng. Je suis donc ébahi par leur manie des mots pour dire les maux, la vie, l’amour et les vices. Je me suis dit : « ah… tiens ! J’ai aussi des charges de ma société et de ma vie à décharger quelque part ». C’est ainsi que j’écris mon premier poème « la vie est au champ » où j’émets mon idée dans un style que l’androiditisme appelle aujourd’hui la rime plate prolongée. Je soumets ce texte à l’un de mes enseignants, M. Nkane, qui était le plus ouvert et le plus disposé de tous mes enseignants pour révéler un talent, il reçoit le poème, apporte les corrections et me montre les rouages de la poésie. Je suis donc galvanisé à continuer. C’est ainsi que j’écris Communauté spéciale jusqu’en terminale et que je publie, en première édition, en 2020. Ce retard de publication était dû à la difficulté de trouver des éditeurs. C’est dans ma recherche des éditeurs que je tombe sur l’un d’eux qui me dit que mon livre a des textes dont la poésie ne reconnaît pas. C’est ainsi que je me suis dit : « voilà ! Je suis donc en mode style nouveau mais adapté à la réalité actuelle ». Je m’exclame donc, comme pour me féliciter, que je suis andoiditiste. C’est là où est la notion d’androiditisme que j’ai mûri et continue à mûrir avec le temps. Au total, les lectures, ma vie et la société ont été mes premières sources d’inspiration.
2. Pouvez-vous nous parler de l’évolution de votre style littéraire et de la manière dont il a été influencé par différents courants et auteurs ?
SDME : L’andoiditisme, ainsi que le révèlent mes précédents propos, a été influencé à la base par l’anticonformisme de Prévert. Il apparaît pour la première fois, en théorie et en pratique dans Communauté spéciale. C’est avec le temps qu’il a été mûri aux moyens de mes recherches et des publications des œuvres androiditistes. Il s’agit, après chaque publication d’un livre androiditiste, de dénicher ses intérêts vis-à-vis de l’androiditisme et les faiblesses que l’andoiditisme doit améliorer. Sinon, le mot androiditisme est forgé est 2018, sa pratique se voit dans tout ce que j’ai publié et son manifeste a été rédigé en 2022 et sortira d’ici peu.
3. En quoi consiste l’androiditisme, le courant littéraire que vous avez développé ? Comment ce concept se reflète-t-il dans vos œuvres ?
SDME : L’androiditisme est un automatisme procédural ou une procédure automatiste par lequel ou par laquelle un écrivain actuel se charge d’adapter ses écrits à la réalité postmoderne actuelle. Il essaye donc de résoudre le problème de l’adaptation et de l’adaptabilité de l’écriture à la réalité postmoderne actuelle. Et il se pratique à partir d’une méthode que nous avons appelée l’androidification et qui se fait au moyen de cinq éléments : la clarification, la simplification, l’économisation, l’innovation et l’actualisation. On est donc androiditiste soit en androidifiant (faire l’androiditisme en suivant initialement sa méthode), soit en androiditisant (en rendant androiditiste les données anciennes). Je préfère laisser le manifeste s’exprimer au moment opportun afin de révéler en profondeur son noème.
Pour ce qui est du deuxième volet de votre question, je dirais qu’à me lire vous verrez vous-même le libertisme, le concrétisme etc, androiditiste. De même, les styles tels que le ‘’1 vers-1 refrain-à la ligne (1V-1R-L), la rime plate prolongée, la cadence des vers sont aussi frappant pour attirer la curiosité même d’un esprit qui ne connaît pas l’androiditisme.
4. Parmi les auteurs qui vous ont influencé, y en a-t-il un ou des auteurs en particulier dont les idées ont eu un impact majeur sur votre propre perspective artistique ?
SDME : Oui ! Prévert, Tchikaya U’tamsi, Nietzche, le poète maudit, Lamartine, Anne Cillon Perri, Desnos Robert (Je me souviens de son ‘’il a pu toucher mon cœur’’ dans État de veille. Rire 😂)
Partie 2 : L’Œuvre « La hargne des paradoxalités »
5. Dans votre recueil « La hargne des paradoxalités », vous abordez des thèmes sociaux complexes. Quelles sont les motivations qui vous ont poussé à explorer ces thèmes dans votre écriture ?
SDME : Je m’attendais vraiment à ce que l’expression ‘’thèmes complexes’’ apparaissent dans votre première question relative à cette œuvre. Le contraire m’aurait étonné (rire 😂). En fait, j’écris La hargne des paradoxalités pendant une période dans laquelle je subis une ascendance spirituelle que moi-même je ne peux expliquer jusqu’ici. Les livres que je lis, les preuves que je vis, les choses que j’observe, les événements… tout pendant cette période est et paraît spirituel. À cela s’ajoute la recrudescence des vices dans les milieux spirituels comme les églises.
6. Pouvez-vous nous expliquer davantage votre approche stylistique et comment elle contribue à la transmission de vos messages dans vos poèmes ?
SDME : Je suis androiditiste, m adame ! Ne le perdez pas de vue. J’ai ébauché l’androiditisme précédemment.
7. Quel est le message central que vous envoyez à vos lecteurs à travers votre livre « La hargne des paradoxalités » ?
SDME : Un recueil de poèmes consacré aux paradoxes de la nature, résultat de l’action humaine et les conséquences de ces paradoxes sur ce dernier et sur les autres espèces. Un débit de textes portant sur la métaphysique, la physique, l’anthropocentrisme, le théocentrisme, l’anthropothéisme, le zoocentrisme, le zoothéisme… Que l’homme s’élève à la surtranscendance du bien pour son ataraxie, celle de son ou de ses dieux et celle des autres espèces.
8. Quel rôle joue la poésie, selon vous, dans la réflexion et la sensibilisation des gens aux problèmes sociétaux abordés dans votre recueil ?
SDME : On danse en comprenant pour changer. Il y a un art de la poésie comme le poète qui dessine les maux dans les mots. Cet art est le « calme ». Et ne l’appelle surtout pas ton ami parce qu’il est comme l’eau. Aussi douce qu’est l’eau, elle arrive quand-même à fondre la pierre.
9. Au-delà de la réflexion, espérez-vous que votre recueil ait un impact concret sur la société ? Si oui, de quelle manière ?
SDME : Oui ! D’abord faudrait-il mentionner que ce recueil n’est pas que réflexion au sens stricte du terme. Il est la copie des natures et des sociétés actuelles, aussi déformées qu’elles soient. Et ce sont ces déformations qu’il vise à réformer. Suivant cette logique, il y a nécessairement un impact concret qu’il a sur la société. En effet, La hargne des paradoxalités retire son lecteur des vices pour le situer au piédestal d’un homme pas parfait, mais à l’image d’un dieu qui peut par erreur, et non consciemment, faillir. Sachant que la société est l’image de son homme, lorsque l’homme est impacté, sa société est également impactée. C’est suivant cette logique que mon recueil impacte concrètement la société. Le tout c’est d’apprendre à demander aux autres, comme Kant, que « Et si tout le monde faisait comme moi ? ».
Partie 3 : Futurs Projets et Perspectives
10. Quels sont vos projets littéraires à venir ? Pouvons-nous nous attendre à d’autres œuvres explorant des thématiques similaires ou envisagez-vous d’explorer de nouveaux horizons ?
SDME : J’ai plusieurs projets pour l’avenir. Je viens de publier Saturation de la brûlure coécrit avec l’écrivain androiditiste Stéphane Éric NTOLO ZO’OBO (la toute première collaboration de deux écrivains androiditistes). Avant lui, j’ai publié Primauté. Ensuite, il y a le manifeste de l’androiditisme qui arrive, une correspondancie, des poémans, des romans, des poésies, des poâtres etc. C’est énorme, en fait.
Pour des thématiques : j’ai des livres qui abordent des thématiques similaires (Primauté, par exemple) et d’autres qui explorent d’autres horizons.
11. Pouvez-vous nous donner un aperçu de la manière dont vous envisagez d’évoluer en tant qu’écrivain dans les prochaines années ?
SDME : Un écrivain ne décrit pas son évolution future comme une ligne droite. Il va de son inspiration et des rouages. Mais, je compte publier autant que faire se peut afin de faire connaître l’androiditisme.
12. Comment percevez-vous le rôle des écrivains et des artistes dans la société actuelle, en particulier en ce qui concerne la sensibilisation aux enjeux sociaux ?
SDME : Pour ma part, l’art vide, l’art pour l’art n’a plus lieu d’être (l’art en lui-même est déjà le beau). Dans un monde aussi artificiel, qui repose sur le paraître et aussi pire que Sodome et Gomorrhe, l’écrivain est le seul, en tant qu’homme de vertu et de dignité, à faire renaître le vrai, le juste et le véridique. L’heure n’est plus à la blague pour nous les écrivains.
13. Y a-t-il un conseil que vous aimeriez partager avec les jeunes auteurs qui cherchent à exprimer des idées complexes à travers leur écriture ?
SDME : Chers jeunes auteurs, faites ! Lancez-vous. Le livre est le seul moyen d’ici-bas pouvant décomplexifier ce que vous vivez de plus complexe. N’ayez point peur. Allez-y ! Le livre en lui-même vous sauvera et vous justifiera.
14. Comment décririez-vous votre objectif ultime en tant qu’écrivain et théoricien, et quel impact aimeriez-vous avoir sur le paysage littéraire et la société en général ?
SDME : Je suis un écrivain androiditiste qui veut faire de la littérature un renouveau au-dessus des autres arts et de la technologie comme elle l’était avant. Je suis un écrivain androiditiste qui vise à faire des sociétés les lieux du vivre juste, vertueux, digne, vrai, équilibré, équitable pour les hommes, leurs dieux et les autres espèces.
15. Un mot pour conclure !
SDME : Puisque l’essentiel a été dit, je ne peux que vous remercier pour cet entretien, tout en vous félicitant pour votre dynamisme et votre engagement pour le monde littéraire, en vous encourageant d’aller de l’avant.
Merci à vous !
Propos recueillis par Ruth AMOUSSOUGA
