Les deux amis marchèrent l’un derrière l’autre sans pourtant articuler le moindre mot. Arrivés au-dehors, les deux s’installèrent dans la voiture de Sergio. Ce dernier mit le moteur en marche et s’élança sur la voie. Intrigué par le silence de son ami, Raymond décida de briser le silence.

— Merci, Sergio.
Un large sourire se dessina sur les lèvres de celui-ci qui déclina les yeux de son volant et les positionnèrent sur Raymond.
— Non, mon frère, fit-il finalement, tu n’as pas à me remercier.
Après ces mots, le silence s’installa à nouveau.
— Sinon, qu’est-ce qui se passe ? demanda Raymond. Tout à l’heure, je t’ai vu regarder l’inspectrice et depuis que nous sommes sortis, plus rien. Je te sens stressé.
— L’inspectrice ? Laisse-la, elle s’est foutue de notre gueule et ce qui m’énerve, c’est le fait que tu l’aies défendu.
— Qu’a-t-elle fait ?
— Tu imagines ? Elle n’a jamais appelé le bureau du juge.
L’expression sur le visage de Raymond changea d’un coup.
— Que dis-tu ? Tu blagues, n’est-ce pas ?
— Comment puis-je blaguer avec une telle chose ? Elle n’a jamais appelé le bureau du juge pour quoi que ce soit, même pas sa secrétaire.
— Je comprends mieux maintenant les choses, cette inspectrice est l’une des leurs.
— Que veux-tu dire par l’une des leurs ? Tu veux dire quoi exactement ?
— Je pense que j’ai été piégé par une organisation.
— Une quoi ? Qu’as-tu fait pour qu’une organisation soit à tes trousses Raymond ?
Raymond s’adossa à son siège, tourna les yeux vers le paysage comme s’il voulait se rappeler de quelque chose, comme si la réponse à la question de son ami se trouvait à travers le paysage qui se défilait sous ses yeux.
— Tu te rappelles d’Ismo ? demanda-t-il.
— Ismo ? Le client dont tu m’avais parlé ?
— Oui, exact.
— Qu’en est-il de la suite ? Que s’est-il passé ?
— C’était…
***
Trois mois plutôt…
Ce jour-là, le ciel était nuageux en plein après-midi annonçant l’arrivée d’une pluie. Le soleil, maître de cette heure, était absent. Un homme de la trentaine s’était pointé dans le bureau de Raymond, il avait l’air abattu, désespéré, c’était comme s’il n’avait plus goût à la vie.
– Je suis à vous, fit Raymond.
– Il y a quelques jours, ma sœur a disparu.
– Avez-vous informé la police ?
– Oui.
– Écoutez monsieur, si vous êtes ici pour un cas de disparition, je suis désolé, je ne suis pas en mesure d’intervenir. Je peux vous aider si seulement vous connaissez la personne qui a enlevé votre sœur, mais avec des preuves bien sûr.
– Ce n’est pas uniquement une histoire de disparition.
– Allez-y, dites-moi tout.
– Elle a été retrouvée, mais dans un sale état.
– Un sale état ? Que voulez-vous dire par dans un sale état ? Elle est morte ? Décapitée ?
L’homme baissa la tête, essaya de mieux se concentrer pour poursuivre ce qu’il avait à dire.
– Violée, cracha-t-il. Elle a été violée.
– C’est un cas un peu particulier, avez-vous des preuves ? Connaissez-vous celui qui aurait commis ce forfait ?
– Oui, je connais les personnes qui l’ont fait, mais ce n’est pas aussi simple que ça.
– Comment ça ?
– Ils sont puissants, très puissants.
– Pas puissants en tant que tels, rien n’est puissant aux yeux de la loi.
– Je le sais, mais ces gens-là ne sont pas n’importe qui, ils peuvent faire disparaître les gens quand ils veulent.
– Qui sont-ils ?
– C’est un groupe criminel.
– Comment avez-vous su que c’était eux ? Quelqu’un les a vus ?
– Ma sœur, elle en a parlé.
– Où est-elle ?
– Dans un centre de désintoxication.
– C’est difficile d’accepter les mots qui viennent de la part d’une personne droguée ou d’une personne qui n’est pas clean.
– Ma sœur est consciente et le docteur qui s’occupe d’elle a dit qu’elle peut parler.
– Si ceux qui lui ont fait ça sont puissants, ne pensez-vous pas qu’elle ne soit plus là ? Ou qu’ils chercheront à la tuer ? Que dit la police ?
– La police est corrompue par ces derniers, ils m’ont dit de me débrouiller. C’est quelqu’un qui m’a dit que si je venais vous voir, j’aurai ce dont j’ai besoin.
– Amenez-moi voir votre sœur. Nous allons tirer cette histoire au clair.
Raymond se leva, ajusta la chemise de sa veste et sortit accompagné du malheureux. Arrivé dans le bureau de sa secrétaire, il s’arrêta.
– Je ne serai pas là durant toute la journée, fit-il en consultant sa montre.
– C’est noté monsieur.
Le monsieur accompagna Raymond. Au-dehors, le ciel avait déjà commencé par cracher quelques petites gouttes, à croire que la pluie n’allait pas tarder à verser sa colère sur toute la ville.
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Le centre de désintoxication était animé par le bruit des patients qui se trouvaient sur les lieux. D’autres hurlaient de douleur pendant que d’autres réclamaient leurs doses habituelles. Soudain, la voiture de Raymond s’arrêta dans la cour. Les deux descendirent et se précipitèrent vers l’entrée. À peine avaient-ils franchi la pelouse que la nature ouvrit sa grande gueule pour commencer par déverser l’eau sur la ville. Les deux se précipitèrent vers l’entrée, traversèrent le couloir jusqu’à s’arrêter devant une porte. Une infirmière se précipita vers eux.
– Soyez les bienvenus, que puis-je faire pour vous ? demanda-t-elle.
– Nous sommes venus voir ma sœur.
– Vous pouvez partir.
Raymond suivit le monsieur jusqu’à une chambre. Une jeune femme, assise sur son lit, le regard complètement vide, était sans émotion.
– C’est elle ? demanda Raymond.
– Oui, c’est ma sœur.
Les deux entrèrent.
– Yolande, tu es là ?
– C’est toi ? Oui, je suis là.
– Comment te sens-tu ?
– J’ai mal en bas et j’ai vraiment un manque.
– Ça va aller.
– C’est qui ?
– Ce monsieur ? C’est un avocat, il est là pour t’écouter, il va nous aider, tu peux lui parler, tu sais.
– Tu me le confirmes vraiment ?
– Oui, vas-y.
– Alice, tu te rappelles encore de ce qui s’est passé ?
– Oui, c’était un soir, je revenais de l’Université quand un monsieur s’est arrêté devant moi. À l’intérieur, se trouvait une connaissance, une camarade avec qui je suis à l’université. Elle m’a dit qu’elle allait me déposer, j’ai accepté et je suis montée. Je ne sais pas ce qui s’est passé, je me suis réveillée dans une petite chambre et…
Elle se tut, regarda son frère qui la prit par la main.
– Je suis là, vas-y.
– Si vous ne vous sentez pas bien, on peut continuer demain ou après-demain ou dès votre sortie.
– Non ! Je vais continuer. Dès mon réveil, j’étais dans une petite chambre avec un certain monsieur, il voulait coucher avec moi, j’ai refusé. Il s’est mis à me gifler et après, il est sorti. Peu de temps après, je lui ai entendu dire à une voix qu’il avait payé une forte somme pour avoir une vierge dans son lit qui va l’obéir et non une qui va l’insulter et refuser de répondre à ses exigences. Après ces mots, deux sont rentrés avec une seringue. L’un a gardé mes deux mains et au moment que je débattais, j’ai senti une piqûre dans mon cou. C’est ainsi que je suis devenue faible, difficile de soulever mes pieds et mes bras. Le monsieur en question est revenu, il a commencé par me déshabiller et tout. Je ne pouvais pas réagir, pire, crier. Finalement, il m’a violée. Les jours suivants, j’ai suivi la même chose, j’étais devenue une poupée sexuelle, on m’administrait des doses de drogue et me laissait à des hommes qui abusaient de moi.
– Et comment êtes-vous sorties ? demanda Raymond.
– C’est un soir qu’ils m’ont pris et m’ont jetée au milieu de nulle part. Au même moment, j’ai été repêché par un conducteur de camion qui m’a amenée au poste de police et mon frère a été contacté.
– Et l’amie ?
– Je ne sais pas où elle est.
– Peux-tu me donner ses adresses ?
– Je ne connais pas ses adresses, mais elle s’appelle Fidelia Alonzo.
– Je suis désolé pour ce qu’ils t’ont fait.
– Vous pouvez faire quelque chose ? Hein ? Ils ne resteront pas impunis, n’est-ce pas ? demanda le frère.
– Je vous promets de faire le nécessaire, rassura Raymond.
– Merci beaucoup, monsieur, dit Yolande les larmes aux yeux.
Raymond la rassura de faire tout ce qui était en son pouvoir pour faire payer ceux qui lui ont fait vivre ces atrocités. Les jours suivants, il s’était lancé dans une enquête, suivant les traces et les pistes jusqu’à retrouver Fidelia Alonzo. Suite aux menaces de Raymond, cette dernière confia qu’elle travaillait pour une organisation et que c’était dans son devoir de repêcher des jeunes filles. Poussée à tout cracher, elle récita tout ce qu’elle savait d’autres. Déterminé à aller jusqu’au bout, Raymond se présenta un soir dans leur salle de réunion avec Fidelia.
– Qui a laissé cet homme entrer ? demanda le parrain.
– Fidelia ? Qui est cet homme et pourquoi il est avec toi ? s’empressa Élise.
– Je suis désolée, mais il est…
– Je suis un avocat, coupa Raymond et si je suis là, c’est pour vous dire que vous avez été loin en faisant du n’importe quoi à une jeune fille.
– Vous êtes avocat ou je ne sais pas quoi. Vous feriez mieux de quitter les lieux et de ne plus jamais remettre les pieds ici, menaça Pablo.
– Vous pouvez garder vos menaces. Elle m’a dit que le commanditaire s’appelle Élise. Je pense que c’est vous, vous devez dédommager ma cliente et la vexer une somme conséquente. Sinon, je vous ferai arrêter pour trafic, kidnapping de jeunes filles.
– Assez ! cria le parrain en se levant. Jeune Homme, il n’y aura rien et vous feriez mieux de sortir.
– Qui êtes-vous ? À vous voir, j’imagine que vous êtes le patron. Vous êtes tous des bandes de criminels et croyez-moi, je vous ferai tomber.
– Tu oses me menacer ? demanda le parrain en s’approchant de Raymond. Je suis un Boss.
– Qui êtes-vous ? répéta-t-il. Vous ne me faites pas peur, peut-être les autres, mais pas moi.
– Tu as du culot. Une simple main et je te tuerai.
– Comme vous tuez les gens ?
– Je te ferai vivre quelque chose de plus atroce que nous avons fait à cette fille et crois-moi, tu me supplieras de te laisser vivre ou de te tuer pour apaiser tes souffrances.
– Laissez-moi le tuer, fit un garde.
Il s’approcha de Raymond et braqua son pistolet sur lui.
– Non, l’arrêta le parrain. Jetez-moi cette ordure au-dehors et faites-lui la fête.
– Si jamais quelqu’un d’entre vous me touche, je lui ferai voir.
Il mit la main dans sa poche et sortit un stylo.
– Vous voyez ce stylo. Ce stylo contient un micro. Il envoie automatiquement des copies sur un cloud sécurisé. Si quelque chose m’arrive, la police recevra tout. Touchez à un seul de mes cheveux et vous verrez. Je sais que vous aviez des hommes dans la police, mais pas dans le SWAT. Vous n’allez pas digérer la suite. Allez-y, touchez-moi.
– Vous tentez de nous menacer ?
– Vous avez trois jours Élise, juste trois jours, pour faire ce que je vous ai demandé sinon, vous n’allez pas aimer la suite.
Sur ces mots, Raymond alluma le stylo, le déposa sur la table.
– Vous pouvez garder cette copie.
Il les regarda à tour de rôle et sortit. Fier d’avoir réussi son coup.
À suivre…
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