L’ESCLAVE : Félix COUCHORO
L’ESCLAVE : Félix COUCHORO

L’ESCLAVE : Félix COUCHORO

Le célèbre ouvrage « L’esclave », est le premier roman Béninois écrit par l’écrivain Bénino-Togolais Félix COUCHORO. Il a été publié aux Éditions de ’’ la dépêche africaine’’ en 1929. Il fait partie des œuvres ayant favorisées la naissance de la littérature négro-africaine. À travers ce roman subdivisé en deux parties, contenant chacune 07 chapitres, l’auteur peint les réalités d’une Afrique noire tout entrant dans les méandres de la tradition et de la culture.

Résumé de l’ouvrage l’esclave de Félix COUCHORO

L’histoire se déroule au bord du fleuve Mono dans un village appelé « Hutingomè ». Mawoulawê, un esclave acheté par le père de Komlangan, est considéré au même titre que l’enfant légitime de ce dernier. Au soir de sa vie terrestre, le maitre de céans fit appeler ses enfants (Mawoulawê l’esclave et Komlangan le fils légitime ainsi qu’à sa femme). 

Il les exhorta à toujours rester unis et à s’aimer comme il le faut tout en demandant à sa belle-fille de veiller sur la maisonnée. Quelque temps après le décès de son maître, Mawoulawê obsédé par la richesse commença à réclamer sa part d’héritage à son frère Komlangan fils légataire. 

Ce dernier n’étant pas du même avis que lui, lui donna comme lot de consolation une palmeraie. Cette générosité au lieu d’apaiser les ardeurs de l’esclave est vu comme un affront à sa personne ce qui suscita en lui un sentiment de frustration, de jalousie et de haine qu’il se garda bien de montrer. 

Komlangan le fils légataire étant un polygame décida de prendre une quatrième épouse Akoêba une femme dont la beauté époustouflante rayonne à la lumière du soleil. Quelques mois après son mariage grandiose, elle se surprit nourrissant des sentiments pour Mawoulawê son beau-frère. 

Quelque temps plus tard, les deux tourtereaux (Mawoulawê et Akoêba) finissent par se mettre ensemble et ce, discrètement. À la suite de cette relation, Akoêba tomba enceinte et décida de garder le secret et d’endosser la responsabilité de la paternité à son époux Komlangan. 

Ironie du sort, Dansi la femme de Mawoulawê fut au courant de cette situation et décida d’en parler à son beau-frère, mais alla également partager ce secret avec sa voisine-amie. Les deux amoureux ayant appris cela, décidèrent d’éliminer par tous les moyens cette dernière. Vont-ils arriver à leur fin ? 

Comment cette situation va-t-elle se terminer ? Comment comprendre le cultuel du culturel dans la tradition africaine ?

Analyse et critique de l’ouvrage l’esclave

Comme tout ouvrage de cette époque et écrit par un auteur africain d’origine Bénino-Togolaise, la présence des réalités propres à l’Afrique noire ne peuvent être que présentes et en grande partie. La tradition africaine n’est pas passée sous silence dans cette œuvre majeure et Félix COUCHORO en faisant une description parfaite et minutieuse des faits démontre de quel milieu il est issu et ce qui fait le quotidien de cette société nourrie et moulée dans le cultuel. 

Malgré cet attachement et un respect strict de la tradition, des déviances ne manquent pas et cela à travers ce passage qui montre l’acte incestueuse posé par l’esclave et la dernière épouse de son frère Komlangan : « le corps fatigué, ils se reposaient de leur ébat quand cinq mots tombaient de la bouche de la jeune femme. Cinq mots redoutables je suis enceinte de toi » …p.104.

Aussi, il faut noter qu’en Afrique les affaires de partage de biens créent toujours des différences ce qui peut conduire aux sacrifices suprêmes et la naissance des sentiments noirs et sombres « la haine, la jalousie, ambition démesurée, orgueil » …p.15. L’union entre deux personnes est sacrée dans un contexte africain. 

Car, deux personnes de sexe opposé qui quittent leurs familles pour se mettre ensemble signifie la liaison de deux familles donc de deux entités qui venus d’horizon divers, doivent s’entendre pour cohabiter dans un même milieu pour faire régner la paix et l’harmonie. 

Ce même aspect est vu dans les écritures bibliques qui annoncent le détachement de la femme de sa famille pour s’unir à son époux et lui être soumis ; ce qui dénote des paroles sages du père de Akoêba : 

« Ma fille tu pars de chez nous pour aller vers ton mari, tout le monde n’a point la faiblesse d’un père, ni l’affectueuse indulgence d’une mère que tu trouves ici chez nous, te voilà avec ton mari ou ton inexpérience de jeune fille va vivre »…p. 24 et 25

Il fait cas aussi de la fraternité légendaire de l’Afrique par les propos de la mère de Kodjo. « La tige de la fraternité ploie, mais ne rompt pas » …p.171

Cette œuvre tourne autour des thèmes comme : l’amour, l’inceste, la fratricide, l’esclavage, l’hypocrisie, l’héritage et la richesse de la culture africaine. La lecture de l’ouvrage est plaisante et facile à comprendre. Le vocabulaire est adéquat et à la portée d’un public plus large malgré l’époque de parution de cet ouvrage. 

L’auteur a aussi eu le mérite de démontrer que faire confiance aux religions endogènes est une bonne chose puisqu’elle sauve la mise dans les pires moments et au même titre qu’elle peut nuire dangereusement.

Les personnages de l’ouvrage L’esclave de Félix COUCHORO 

  • Komlangan : Père de famille, époux de Akoêba et père de 04 enfants (Aîné Gabriel).
  • Mawoulawê : Esclave acheté et adopté par le père de Komlangan. 
  • Akoêba : Dernière épouse de Komlangan, amante de Mawoulawê.

Félix COUCHORO : le premier écrivain du Bénin

Le premier écrivain du Bénin est considéré comme étant Félix COUCHORO. Il est né le 30 janvier 1900 à Ouidah au Bénin et mort le 5 avril 1968 à Lomé au Togo. Il est connu pour son roman « L’Esclave » publié en 1929. 

Il faut noter que le Bénin a une riche tradition orale et de nombreux conteurs et griots ont contribué à la littérature béninoise avant l’émergence de la littérature écrite. Longtemps dénommé « le quartier latin de l’Afrique », le Bénin a donné naissance à des précurseurs de la littérature africaine (Paul Hazoumé, Félix COUCHORO…).

Thierry HOUNYE est journaliste, rédacteur web et chroniqueur à L’ivre du livre. Il est philosophe de formation à l’Université d’Abomey-Calavi (UAC).  

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