Le livre Le royaume des damnés paru aux éditions Savanes du continent en 2020 est le premier roman de Niyi Mayowa. Il couvre 133 pages et traite fondamentalement de la vie politique dans les pays africains. Dans ce livre, le jeune écrivain béninois s’inspire des réalités de son pays pour établir le rapport entre les dirigeants et les dirigés.
Depuis les indépendances, la plupart des pays africains végètent dans une instabilité politique marquée par des troubles et des coups d’État. Face à cette problématique qui a la peau dure, de nombreux écrivains africains ont dégainé leur plume. Certains pour simplement exposer les situations qui prévaut dans leur pays et dans la sous région. D’autres pour tenter aussi de proposer de manière astucieuse des pistes de solutions.
Niyi Mayowa s’inscrit dans une logique de dénonciation à la suite des écrivains de renom comme Ahmadou Kourouma, Nazi Boni, Jean-Pliya, Olympe Bhêly-Quenum. Comme Les soleils des indépendances, Allah n’est pas obligé, Le Royaume des damnés évoque les tares de son pays.
Dans son livre Le royaume des damnés, Niyi Mayowa raconte l’histoire de Olola, un directeur de cabinet déchu. Ce dernier est l’époux de Senan Akuévi, infirmière dans un hôpital du royaume des damnés. C’est d’ailleurs par le biais de celle-ci, qu’il parvient à se hisser à un tel poste de responsabilité.
Mais depuis que son époux est nommé à la présidence, Akuévi est devenu femme de ménage à la demande de son mari. C’est elle qui s’occupe des affaires courantes du foyer.
Senan Akuévi est une fille issue d’une famille aisée et bien positionnée sur l’échiquier politique du royaume. C’est son oncle, un proche du président du royaume des damnés, qui positionna Olala comme le directeur de campagne de celui-ci lors des dernières échéances électorales.
A l’issue de celles-ci le président étant sorti victorieux laissa Olala sur le carreau pendant un long moment. Il décida finalement de le nommer à la suite de quelques événements. Mais trois mois seulement après sa nomination, il fut remercié par le président. Un limogeage que Olala digéra difficilement et qui affecta sérieusement sa vie de couple.
Le royaume des damnés de Niyi Mayowa évoque outre les coulisses de la gestion de la chose politique, le déroulement des campagnes électorales. Il montre l’assujettissement et l’abrutissement du peuple face aux pouvoirs de l’argent. Dans le déroulement des campagnes électorales conduisant à l’élection d’un nouveau président, ou du moins, roi du royaume, il décrit le comportement de la population.
Cette dernière qui sait pertinemment qu’elle est bernée mais qui refuse de prendre ses responsabilités. Il montre aussi les machinations politiques dans les états-majors des partis politiques pour la prise du pouvoir. C’est ainsi que des citoyens ignorants voire ignares subissent sans jamais chercher à comprendre les véritables raisons de certaines décisions.
Olala le personnage principal en a fait les frais et a rapidement compris que pour réussir, il lui faut forger sa personnalité en dehors de la politique.
Bien que tous les citoyens aient leur sort lié à celui de la politique, Niyi Mayowa semble remarquer que chacun doit prendre ses responsabilités en main. Dans sa première production romanesque, il montre comment et à quel niveau le peuple se laisse manipuler par les hommes politiques. Il prouve aussi que les décisions politiques ont de graves conséquences sur la vie de chaque citoyen.
Ce n’est donc pas pour le plaisir de la lecture qu’il décrit le quartier présidentiel et le cadre habitant le domicile de Olala. Ce dernier, attaché aux bien-être de ses concitoyens incarne les valeurs nécessaires pour l’épanouissement collectif. L’auteur le montre faisant face aux atrocités de la vie comme la plupart des citoyens du royaume.
Cela l’obligea d’ailleurs à revenir à son ancien emploi après son licenciement de la présidence. Il cherchera aussi une bourse d’étude grâce à son ami et frère. Une bourse qui lui permettra d’aller au-delà des frontières pour acquérir les compétences nécessaires au développement économique et politique de son pays.
Le déroulement des événements, la description du cadre spatial et même la date de parution du livre retiennent l’attention. Ces différents éléments font penser aux dernières élections présidentielles du Bénin, notamment celle de 2016. Toute œuvre trouvant sa source dans la réalité, il est facile de conclure que c’est surtout la vie politique du Bénin que l’auteur décrit.
Il le fait avec une grande ingéniosité et parvient à capter l’attention du lecteur grâce à l’originalité du récit. Les notes d’humour et les figures de styles jonchées dans sa production contribuent à la beauté littéraire du livre. Ce jeune écrivain béninois, tout en s’inspirant fortement de l’histoire et de l’actualité politique de son pays ces dernières années, réussit à brouiller les pistes.
Il parle de président aux multiples actions sociales en fin de mandat, d’alliance pour mettre à mal le dauphin sans donner plus d’indice aux lecteurs. Il est vrai que l’histoire du conteneur d’argent évoqué par Niyi Mayowa est une grande référence dans l’histoire politique du Bénin. Cependant, il faut être très présent d’esprit et avoir une bonne connaissance de l’actualité politique pour se plonger totalement dans son livre. Un livre subtile et profond sur la politique des pays d’Afrique.