La vengeance est l’un des vilains sentiments qui, une fois ayant saisi l’homme, le pousse à accomplir des actes vils qui endorment sa conscience et nourrissent son égo. Lorsque ses écailles s’évanouissent des yeux de l’homme, celui-ci se rend compte de l’absurdité de ses entreprises. Mais combien parvient à s’en remettre ? Laurent Gounelle dans son roman Le philosophe qui n’était pas sage nous montre combien le sentiment de vengeance nuit à la conscience de l’homme. Publié en 2012 aux Éditions Kero, ce roman s’étend sur 320 pages.
Présentation de la couverture et impressions sur l’oeuvre Le philosophe qui n’était pas sage de Laurent Gounelle
Le philosophe qui n’était pas sage est une oeuvre qui se présente sur un fond blanc. La première de couverture nous montre la silhouette de la tête d’un homme dont l’intérieur est plein de branches d’arbres. Cette silhouette est également habité par une silhouette de femme en tenue d’Ève mais de dos qui semblait descendre dans la gorge de la première.
L’identité de l’auteur, écrit en blanc surplombe l’image de la couverture. Celle-ci précède le titre de l’oeuvre écrit en rouge ainsi que le genre de l’oeuvre en blanc. Cette première de couverture s’achève sur la maison d’édition.
La quatrième de couverture nous dévoile une image de l’auteur, le visage aux anges. Elle est suivie d’un titre qui annonce un avant goût de l’œuvre, d’un bref résumé puis de quelques commentaires.
Après l’analyse de la couverture de l’œuvre, on peut s’attendre à une histoire se déroulant au cœur de la nature. La couleur verte exprimant l’espoir, nous annonce l’esprit des personnages. La silhouette de la jeune femme qui s’enfuit en tenue d’Ève peut nous amener à dire qu’une certaine désacralisation a eut lieu dans le déroulement de l’intrigue.
Tout ceci ajouté à la silhouette de la tête d’un homme n’annonce que le caractère houleux de l’histoire.
Résumé du roman le philosophe qui n’était pas sage de laurent gounelle
Sandro est un professeur de philosophie enseignant à l’Université de New York. Les rumeurs sur la mort de Tiffany son épouse, une journaliste qui est allée recueillir des informations sur le peuple Indien, le poussa à renoncer à son sacerdoce ( l’enseignement).
Malgré les mises en garde de son supérieur, Sandro s’embarqua sur mer avec une équipe d’inconnus pour se rendre en forêt afin de venger la mort de son épouse. Les différentes péripéties que l’équipe traverse n’ébranla pas son désir de vengeance. C’est avec Roberto Krakus et sa bande qu’il eût l’idée de monter un plan afin de rendre la vie des indiens misérable.
Une fois dans le village, Sandro assisté de Roberto Krakus et sa bande mirent en place leur fameux plan. Roberto Krakus et sa bande composée de Gody un as des sciences, de Marco et Alfonso étaient des anciens soldats qui n’avaient jamais servi leur État. Le premier obstacle de l’équipe fut la force du mental des Indiens.
Malgré les différentes situations que Krakus et ses amis créaient, les indiens restaient imperturbables. Recourant alors à Sandro la tête pensante de la bande, ils mirent en exécution des projets pour pouvoir saper le moral des Indiens. Au fil des jours, la tranquillité du petit peuple disparut laissant place à des inquiétudes, et à la peur.
Gody sous la demande de Krakus réussit à créer un virus afin que le peuple désespéré puisse mendier son secours. Ce tour de main réussi et Krakus voulu en faire davantage. Sur les conseils de Sandro, ils réussirent à faire croire au peuple indien que le bonheur n’avait pour temple que les biens matériaux. Celui-ci malheureux et sans autre solution s’en remit à Krakus et sa bande.
Élianta, la chamane du village exprimait son indignation face aux actions de ces étrangers. Elle invitait les villageois à la méfiance. Malheureusement les enseignements de son maître ne réussirent pas à l’aider à soigner son peuple. Gody par contre réussit à trouver le remède, du virus qu’il créa et Krakus devient le sauveur des villageois.
Les compétences d’Élianta furent remises en cause par les villageois. Krakus mettait en œuvre d’autres projets maléfiques afin d’anéantir le peuple. Grâce aux supplications d’Élianta, Sandro obligea Krakus à jeter l’éponge mais c’était sans espoir. Sandro était hanté par les citations du philosophe et empereur Marc-Aurèle au point de devenir malade.
Élianta réussit à le soigner et apprit davantage sur Sandro. C’est ainsi que ce dernier apprit que Krakus et sa bande furent les véritables meurtriers de sa Tiffany. Sandro obligea Krakus, à renoncer publiquement à ses projets. Au cours de son discours qui révolta les villageois, Krakus et sa bande trouvèrent la mort. Sandro renonça à sa vengeance.
Analyse et avis sur le roman le philosophe qui n’était pas sage de Laurent Gounelle
La première question qui se pose après la lecture du titre de l’œuvre, est : y a t-il un philosophe dénué de sagesse ? Mieux, la sagesse est-elle l’apanage du philosophe ? Toutes ces différentes questions seront les fils conducteurs qui permettront au lecteur de mieux appréhender le sens du titre.
Puisqu’il faut le dire après la couverture d’un livre, le titre est ce qui suscite une vive curiosité dans l’esprit du lecteur. Sur ce coup-là, il est possible de dire que Laurent Gounelle a réussi à attiser la flamme de la curiosité du lecteur.
Mais loin de s’arrêter uniquement au titre, le lecteur découvrira que c’est au carrefour des événements moulants l’intrigue de l’œuvre que le sens et la vision de l’auteur prennent forme. L’homme peut importe sa fonction, est un être de chair qui est souvent animé par des désirs. Et étant doté de plusieurs facultés intellectuelles, il parvient grâce à celles-ci à recadrer ses désirs.
Au nombre des différents sentiments et désirs qui animent l’homme gît le sentiment, le désir de vengeance. Autrement dit, le désir de se rendre justice. Ce désir une fois né, prend du temps à disparaître ou à force de le refouler il finit toujours par renaître comme nous l’apprend le psychanalyste Sigmund Freud.
Laurent Gounelle nous le dit lui-même à travers son personnage principal Sandro : « La raison ne vient pas à bout des émotions. » p.11. Cependant il est important que l’homme apprenne à transcender ses émotions. Car ces dernières ne lui permettent pas toujours de prendre conscience de la réalité, du monde qui l’entoure.
Il (l’homme) est appelé à agir toujours en accord avec les principes naturels pour son bien et celui de la nature dont il est partie intégrante. Le philosophe français René Descartes nous dit à cet effet dans son Discours de la méthode que nous devons apprendre à contrôler nos émotions et désirs afin que ceux-ci ne modifient pas l’ordre du monde.
Il nous montre par là, toute l’importance de préserver la nature. Le personnage du vieux sage, maître de la chamane Élianta affirme à la page 19 que l’homme doit : « Préserver l’équilibre, le rétablir quand nécessaire.»
À travers l’image des Indiens, Laurent Gounelle nous montre que l’homme est un éternel apprenant qui doit savoir se mettre à l’école de la vie afin d’apprendre. Se nourrir à son intarissable source. L’homme, nous dit-il, est souvent plus attaché à son passé et cela l’empêche parfois de profiter comme cela se doit du présent.
L’incertitude du futur et la peur du lendemain sont des obstacles qui nuisent à son plein épanouissement. Laurent Gounelle dans toute cette œuvre, invite le lecteur à s’inscrire à l’école des sages, des anciens. On peut le lire à la page 57 :
« Mais hier a disparu, mon ami. Nous sommes aujourd’hui, toujours aujourd’hui. ».
Cette phrase fait penser au célèbre auteur Eckhart Tollé qui nous invite dans son ouvrage Le pouvoir du moment présent, à toujours vivre en pleine conscience. Notons que l’auteur nous fait également dans son œuvre une caricature de l’image, des étiquettes qu’on colle aux lettrés et plus particulièrement aux philosophes.
Ces derniers sont considérés par la plupart comme des êtres vivants dans les nuées. Leurs propos, leurs actes et même leur personnalité sont mis en relation avec leurs études. L’auteur nous montre cela à travers le personnage de Roberto Krakus lorsqu’il dit :
« À faire des études trop longues, y en a qui se retrouvent complètement à l’ouest. » p.66.
Le personnage principal de l’œuvre, Sandro, emploie les connaissances acquises le long de ses études philosophiques pour étancher sa soif de vengeance. À travers ses propos et attitudes, on peut lire que l’auteur cherche à démontrer au lecteur que le monde à été créé par un être de pensée.
L’équipe de sandro, une forme d’organisation coloniale
À voir de près, on peut être amené à faire une étude plus profonde de Sandro, Krakus et sa bande composée de Alfonso, Gody et Marco. Laurent Gounelle à travers ces figures, nous glisse subrepticement l’ossature de l’organisation des colonisateurs. Dans cette équipe, nous pouvons voir toutes les figures de l’organisation politique coloniale.
Sandro étant un philosophe, peut être considéré dans l’organisation coloniale comme le chef. Et ce titre est en parfaite communion avec le rôle qu’il a joué dans le processus de métamorphose du peuple indien. Il est à la fois l’illusionniste et le maître du jeu. Sandro est celui qui donna à l’équipe la solution pour pouvoir annihiler, saper le moral du peuple. Il affirmait à la page 67 :
« Ce qu’il faut, c’est commencer par les rendre inconscients, leur endormir l’esprit, encourir leur âmes. Pour mettre en œuvre cette théorie, Krakus et ses épigones créèrent des situations afin de réduire à néant l’espoir et l’enthousiasme des Indiens. Gody, qu’on représentera ici comme la science, inventa le vidophore. Ce dernier est une lumière bleue qui a un effet hypnotiseur sur le peuple indien. C’est grâce à cette machine qu’ils réussirent à détruire la vision du peuple.
Grâce aux incessantes élucubrations de Sandro, Krakus et sa bande parviennent à donner une autre tournure aux événements. Ayant suivi des formations militaires, ces derniers étaient efficaces sur le plan géostratégique. Gody, l’as des sciences est l’une des pièces importantes du puzzle. Avec ses talents de scientifique, il a permis à Krakus d’imposer son autorité.
Parmi les prouesses qu’a accompli Gody, nous pouvons parler de la création d’un virus qui inocule le rhume. À base de cette création, Krakus et son équipe vit la faiblesse du peuple indien. Krakus leur proposa alors la soumission à son autorité contre la guérison du mal.
Nombreuses sont les stratégies de colonisation que Laurent Gounelle nous dévoile dans son œuvre. Parmi celles-ci nous avons la propagande. À travers cette dernière, Krakus et son équipe réussirent à obtenir toute l’attention du peuple indien. L’invention du Jungle Time, une forme de journal qui ressassait les événements de la journée :
« Le Jungle Time multipliait les mauvaises nouvelles.» p.210.
Krakus pointe du doigt toutes les banalités et leur donnent une forme lugubre. Dans le processus de la colonisation, les colonisateurs se heurtent souvent à la vitre de la solidarité et de l’harmonie entre les hommes et la nature. Ces dernières ont le pouvoir de réduire l’effet de leur pouvoir sur le peuple.
Pour atteindre donc leur but, les colonisateurs créent des barrières entre les hommes et la nature. Sandro dit à la page 94 : « Il faut casser ces liens, isoler les Indiens, les séparer physiquement les uns des autres, y compris au sein des familles, pour leur faire oublier le bonheur d’être ensemble. ».
Il continue à la page suivante : « on leur fera miroiter des illusions de bonheur égoïste, jusqu’à finir par leur faire croire que le bonheur se prend sur l’extérieur, comme une victoire sur les autres ». L’une des méthodes efficaces pour asservir les peuples, est la destruction de leur culture, mieux corrompre leurs habitudes avec de nouvelles.
La culture indienne dont nous parle l’œuvre qui a d’ailleurs une forte ressemblance avec celle africaine est une culture dans laquelle hommes et femmes laissent à découvert la partie supérieure (le haut) de leurs corps. Krakus réussit à inculquer aux indiens l’habitude de désormais cacher l’entièreté de leur corps.
On peut le lire à la page 98 lorsqu’il dit à une jeune fille : « Tu dois cacher tes seins.» Les différentes nouveautés, les changements qu’introduisent les colons dans la culture des peuples créent en ceux-ci, une perte d’identité. Mieux ils ne se reconnaissent plus dans leur divers actes et cela les inquiètent.
On peut lire cette inquiétude dans les propos d’Élianta, la chamane du village aux pages 213 et 214 de l’œuvre : « Je ne reconnais plus mon peuple.» p.213 ; « Nous n’agissons plus en conscience. » p.214.
Le philosophe qui n’était pas sage : que comprendre ?
Laurent Gounelle à travers le titre de son ouvrage, nous montre comment les désirs de l’homme peuvent le conduire à la dérive. Mieux, ce titre est également un déchantement que l’auteur opère dans les conscience de tous les hommes : la profession ou les attributs d’un homme ne font pas de lui un sage.
Quand on se réfère aux sages de l’histoire, on remarque qu’ils ont été toute leur vie durant des modèles et qu’ils ont toujours exprimer de l’aversion pour les émotions charnelles. Un sage est celui-là qui se connaît et se maîtrise. L’inscription sise sur le fronton du temple de Delphes qu’on attribue à Socrate l’exprime clairement :
« Connais-toi toi-même !».
Laurent Gounelle exprime cela à sa manière dans l’œuvre à travers le personnage d’Élianta qui rapporte l’une des majeures citations du plus grand sage qu’ait connu l’Inde : Mahatma Gandhi. « Les vraies victoires sont celles que l’on remporte sur soi.» p.226.
Sandro, le philosophe de l’œuvre est le philosophe qui manquait de sagesse parce que n’ayant pas su contrôler ses émotions. Sandro n’avait pas une maîtrise de lui-même et donc envoyait balader les principes moraux qu’il connaissait bien. Dans le but d’étancher sa soif de vengeance, il usait immoralement de la pensée des philosophes qu’il a eu à étudier.
Structure de l’oeuvre et opinions
Le roman Le philosophe qui n’était pas sage de Laurent Gounelle, est un ouvrage composé de trente-huit (38) chapitres. Il débute par une dédicace, ensuite d’une citation de l’empereur philosophe Marc-Aurèle, en plus des différents chapitres puis enfin des notes de remerciements de l’auteur.
Les chapitres aussi vivants et captivants les uns que les autres, tiennent le lecteur en haleine et créent en lui la boulimie d’achever l’œuvre. Les citations des philosophes, notamment celles de Marc-Aurèle, permettent au lecteur de découvrir une pluralité de pensée sur la vie et le monde.
L’ouvrage est bien écrit avec un registre accessible, des descriptions et images saisissantes qui donnent de l’entrain à la lecture. Cette œuvre de Laurent Gounelle bien qu’elle soit un roman, a une haute portée psychologique et philosophique. En dehors de la fiction qui est d’ailleurs le propre du roman, cette œuvre est une véritable invite à l’introspection et à la maîtrise de soi.
La pluralité des termes de l’œuvre offre au lecteur une expérience de lecture enrichissante et une augmentation de son émulation intellectuelle. Cet ouvrage peut faire l’objet d’études philosophiques et psychologiques.
Bref aperçu sur l’auteur
Laurent Gounelle, né le 10 août 1966 à L’Haÿ-les-Roses, est un écrivain français. Il est auteur de plusieurs ouvrages comme:
L’Homme qui voulait être heureux, Éditions Anne-Carrière, 2008
Les Dieux voyagent toujours incognito
Le Philosophe qui n’était pas sage, coédition Plon-Kero, 2012
Le Jour où j’ai appris à vivre, Éditions Kéro, 2014
Et tu trouveras le trésor qui dort en toi, Éditions Kero, 2016
Je te promets la liberté, Calmann-Lévy, 2018
L’Art vous le rend bien, Calmann-Lévy, 2019
Intuitio, Calmann-Lévy, 2021
Le Réveil, Calmann-Lévy, 2022
Un monde presque parfait, Mazarine, 2024
Régis M.HANTAN, chroniqueur chez L’ivre du livre