Un jour, dans mes envolées documentaires, je découvris fortuitement, un ouvrage aux allures révolutionnaires qui comme une prophétie écrite révèle l’avenir du livre: « La documentation dans le numérique » écrit par Olivier le Deuff, enseignant-chercheur et Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication.
Jouant les Cassandres Grecs, beaucoup annoncent à tort ou à raison, prédisent le déclin du livre notamment avec l’avènement du numérique sans oublier aujourd’hui l’intelligence artificielle. Fort heureusement et sans sombrer dans le fatalisme outré, affiché par certains, une lueur d’espoir apparait. Olivier Deuff, dans son ouvrage, vient lever les craintes et dissiper les inquiétudes des uns et des autres car la bibliothéconomie reste et demeure comme une science évolutive qui s’est toujours adaptée au temps et à l’écosystème.
Pour l’auteur, il serait naïf de croire que l’accès à la technologie est synonyme d’autonomie pour l’usager ; cela relève du mythe. Olivier Le Deuff réaffirme la pertinence des compétences documentaires et conceptuelles du professionnel de la documentation face à la multiplication des sources d’informations, notamment via le web. L’une des principales actions à investir par le professionnel n’est autre que la médiation numérique. Par médiation en documentation, on entend l’ensemble des actions, des stratégies mises en place afin de permettre l’accès par l’usager à une information recherchée. Elle se construit par l’élaboration des services de documentation ainsi que par l’aide apportée aux usagers. Cette médiation numérique fait écho à la médiation documentaire, souvent restreinte à la médiation de support papier. Cette activité ne représente donc pas en soi une évolution majeure car le rôle du documentaliste a toujours été de mettre à disposition de l’information, d’accompagner l’usager vers l’information et donc d’être un médiateur de l’information. Il est alors aisé de considérer le numérique comme un vecteur d’information dont l’usager doit connaître les normes afin de pouvoir y accéder, soit grâce aux compétences du professionnel de la documentation, soit à travers des compétences documentaires construites avec le concours de celui-ci. L’auteur montre que la médiation numérique commence à avoir un certain écho au niveau institutionnel et professionnel, notamment par le développement de formations universitaires.
L’ouvrage tend à démontrer qu’il n’y a pas de rupture épistémologique majeure dans les actions et les missions menées par les professionnels de la documentation, mais un glissement, une mue des stratégies professionnelles en fonction des mutations de l’environnement sociotechnique dans lequel ils s’insèrent.
L’auteur incite ces derniers à s’inscrire dans une démarche d’accompagnement du développement d’une culture numérique auprès de leur structure et de leurs usagers, via un ensemble d’actions permettant d’appréhender les enjeux représentées par ses évolutions techniques afin que l’ensemble de la communauté soit en mesure d’exploiter pleinement et de façon avertie les diverses possibilités qu’offre le numérique.
En somme, les professionnels des bibliothèques et de la documentation ne disparaîtront pas avec l’avènement du document numérique et de l’intelligence artificielle : leurs métiers vont changer et sans doute s’enrichir. Ce sera une nouvelle transformation pour les milieux documentaires avec ses réalités et ses pratiques. C’est une question d’adaptation avec son temps !
✍️ Didier Jaurès VOITAN, Documentaliste et spécialiste des questions du livre et de la bibliothéconomie.